Après avoir fait l'objet de violentes répressions sous Staline, les sciences sociales soviétiques connurent avec le Dégel et, plus encore, sous le socialisme tardif, une forte expansion, au point de devenir, lors de la Perestroïka, une réelle force politique. Toutefois, loin de reposer sur un processus linéaire et homogène, cet essor des sciences sociales fut fortement travaillé par les dilemmes de la déstalinisation – entre ambition réformatrice et volonté d'emprise politique, entre tendances libéralisatrice et répressive, entre ouverture internationale et concurrence avec l’Occident. Elles furent en effet sollicitées par un État désormais soucieux de rationaliser la gouvernance socialiste et contribuèrent aux successives tentatives de réforme, tout en restant soumises à un contrôle idéologique et politique. Leur ouverture internationale prit aussi une ampleur sans précédent, rompant avec le relatif isolement d’après-Seconde guerre mondiale, sans pour autant qu’elles puissent échapper aux rivalités de la Guerre froide. Ce sont donc ces contradictions que vise à éclairer ce dossier, en examinant comment, dans la conjoncture post-stalinienne, se sont reconfigurés les rapports entre État socialiste et sciences sociales, à partir d’études de cas consacrées à l’anthropologie, la sociologie, la psychologie et la science politique.
Contributions de
Sergei Alymov, Thibaud Boncourt, Maurice Cassier, Jean-François Condette, Isabelle Gouarné, Olessia Kirtchik, Kristina Kovalskaya, Riel Miller, Léonard Moulin, Sheila Pattle, Pierre-Louis Six, Tamara Svanidze, Teele Tõnismann, Ludovic Tournès, Christian Topalov, Sylvain Wagnon, Shellen X. Wu.