De la fin du IXe au XIIIe siècle a lieu en Occident un processus de séparation des pouvoirs aristocratiques laïques et ecclésiastiques, en lien avec la réforme grégorienne, tandis que l'on assiste également à un phénomène de spatialisation, puis de territorialisation, du pouvoir. Si ces thématiques sont au cœur de nombreuses recherches actuelles, les chercheurs francophones et germanophones les comprennent très différemment. Ainsi, à l’inverse des Français, les Allemands ne se sont quasiment pas, après 1945, intéressés aux problèmes spatiaux : le terme allemand Territorialisierung, qui recouvre l’idée que le pouvoir des aristocrates ait pu être fondé sur un principe territorial et reposer sur des espaces aux frontières plus ou moins bien définies, n’est utilisé que pour décrire des phénomènes à partir de la fin du XIIe siècle.
Ce volume réunit donc les textes de jeunes chercheurs et chercheuses issus des deux rives du Rhin afin de comparer ces approches à partir de l’étude de l’élaboration de nouveaux modèles de domination spatiale dans les royaumes de France et de Germanie. Ils s’intéressent de manière concrète à l’intrication des espaces laïques et ecclésiastiques, aux formes et aux enjeux des zones d’interface entre ces deux mondes, aux conflits et aux interactions résultant de leurs délimitations. Cela doit permettre de dépasser les traditions historiographiques nationales pour susciter de nouvelles approches comparatistes et ainsi créer les conditions d’un dialogue renouvelé.