On assiste depuis les années 2000 à un renouveau des approches historiques du développement. De l'histoire à la science politique, ces travaux font du développement un point d’entrée pour saisir les circulations d’experts et de savoirs, la construction des États au Sud, et plus largement la place des rapports Nord-Sud dans le gouvernement du monde. Si ce renouveau repose sur une diversification des archives mobilisées, il ne s’est pas pour autant accompagné d’un débat sur les usages possibles, mais aussi les limites de ces archives, ni d’enquêtes sur la façon dont les acteurs du développement les produisent.
Ce numéro se veut un plaidoyer pour une réflexion propre aux « archives du développement » en tant que porteuses d’enjeux particuliers, entre Nord et Sud, qu’il s’agisse de l’éclatement géographique des matériaux, ou de la capacité de certains acteurs à (faire) écrire et faire valoir leur récit au détriment des autres. L’objectif poursuivi dans ce dossier est donc double : offrir des points de repère méthodologiques à qui souhaite mobiliser et donc contextualiser ces archives, mais aussi poser les bases d’un projet plus ambitieux d’enquête sur les archives du développement. De l’Inde au Mali, de la Turquie au Canada, les articles de ce dossier explorent dans ce but la façon dont ces archives du développement sont produites, mobilisées, et politisées, sur des sujets aussi divers que l’action humanitaire, l’agriculture, l’énergie solaire, la planification urbaine, l’économie, ou encore la santé.